Les taxis à gaz ! On ne devrait plus encore en parler en 2013 à Bobo-Dioulasso. Et pourtant le phénomène est plus prégnant dans cette ville avec officiellement près d'un millier de taxis convertis au gaz au 2e trimestre de 2011. Il ne s'agit pas des véhicules conçus avec une technologie appropriée de fonctionnement au gaz, mais des tripatouillages incertains sur des voitures à essence ou au gazole dans des garages clandestins, pour pouvoir circuler au gaz domestique. Ils sont reconnaissables dans la circulation par l'odeur caractéristique de combustion du butane, par l'absence de fumée d'échappement et par la bouteille de gaz placée dans le coffre arrière toujours ouvert pour ne pas accumuler des fuites dangereuses.
Le 5 octobre 2011 en effet, le gouvernorat de Bobo-Dioulasso avait accordé un délai de grâce de deux mois aux responsables syndicaux de taxis, pour abandonner l'utilisation jugée illégale et dangereuse du gaz butane comme carburant. Ceux-ci n'avaient pas trouvéà redire contre cette décision, estimant en effet que la pratique est périlleuse à cause des risques d'explosion, d'incendie, des problèmes de santé pour les taximen, ou encore d'avaries sur les moteurs des véhicules. Avec le soutien apparent des premiers acteurs, il n'y avait donc pas d'entraves a priori à l'application de la mesure à la date prévue du 5 décembre 2011.
Elle devait se concrétiser par des contrôles de police et la mise en fourrière systématique de tous les taxis qui continueraient à rouler au gaz. Plus d'une année après, aucun taximan n'a été inquiétéà ce jour. Bien au contraire, c'est la ruée des taxis et des transports en commun vers le gaz. Que se passe-t-il donc ? L'attentisme de l'administration publique, conséquence de la grave crise du premier semestre 2011, et qui menaçait de repartir au moindre incident, peut-il tout justifier ? Le lobbying des transporteurs burkinabè qu'on dit très puissant, est-il venu à bout des velléités d'interdiction du gaz dans les taxis par les pouvoirs publics ? En tout état de cause, le syndicat des taximen avait suggéré au gouverneur des Hauts-Bassins, d'user plutôt de diplomatie avec les usagers du gaz, s'il ne voulait pas provoquer « autre chose ».
Le message est si bien passé que de nos jours, presque tous les taxis de la ville marchent au gaz, de l'aveu même des syndicats, sans compter les autres usagers qui n'ont pas résistéà l'appât du gaz moins cher que l'essence. Ce sont autant de véhicules hors-la-loi qui circulent sans visite technique, car roulant avec un combustible non homologué par les services étatiques de contrôles, donc sans assurance. Du coup, les rares contrôles de police sont assimilables à des journées villes mortes à Bobo-Dioulasso, car tous les taxis à gaz disparaissent de la circulation ou choisissent de fréquenter les voies périphériques plus libres. Les incidents se multiplient sur les véhicules à gaz.
Certains vont même jusqu'à attribuer les bilans de plus en plus lourds d'accidents de circulation, à l'utilisation insouciante de ce combustible. Si la consommation du gaz domestique fortement subventionné n'entraîne pas de pertes supplémentaires de ressources financières, il faudra certainement, que les premières autorités se décident à appliquer une mesure d'interdiction qui ne fera en définitive, que limiter les dégâts et des pertes en vie humaine en cas d'accident.
Mahamadi TIEGNA
Sidwaya