« La majorité des gouvernants de la 4e république ont été pour la plus part des grévistes sinon des organisateurs de grèves ; Monsieur les chefs coutumiers où et avec qui pensez-vous que les enfants ont appris la violence ? Le Chef de file de l'opposition n'est rien d'autre qu'un disciple viscéral de l'impérialisme…». Ce sont là quelques déclarations « chocs » prononcées à l'occasion de la 19e rentrée syndicale Aimée Nikièma. A Bobo-Dioulasso, la bourse du travail a servi de cadre aux membres et sympathisants de la CGTB dans la matinée du jeudi 14 novembre 2013.
« Syndicalisme et politique », c'est le thème de la 19e rentrée syndicale Aimé Nikièma. Rappelons-le, le Dr Aimé Nikièma et Issouf Traoré ont perdu la vie le 14 novembre 1992 suite à un accident de la circulation, alors qu'ils partaient à Diébougou pour y animer une conférence sur les droits humains. Membre fondateur et responsable de plusieurs structures syndicales, Aimé Nikiéma s'est fait remarquer aux yeux de ses camarades par sa vie militante, son combat pour son peuple… C'est pourquoi depuis le 14 novembre 1999, les rentrées syndicales de la CGTB lui sont dédiées. Cette année, la section régionale des Hauts-Bassins de la CGTB et ses invités se sont retrouvés à la bourse du travail, avec deux points majeurs au menu : les discours des syndicats invités et de la CGTB, et les travaux de préparation de la 6e session ordinaire de la CGTB.
Zéphirin Diabré, valet viscéral de l'impérialisme ?
Du Syndicat national des enseignants africains du Burkina (SNEAB) à l'Association nationale des enseignants du Burkina (ANEB) en passant par la Coalition contre la vie chère (CCVC), les discours ont fait un tour d'horizon des conséquences néfastes du monde capitaliste et néolibéral. Persécuteurs des peuples selon les intervenants, le monde néo-libéral est le mal. Ci fait que la boutade de Tolé Sagnon « On ne va pas changer pour changer» a été largement élucidée. Pour la CGTB et pour l'ANEB, le Chef de file de l'opposition politique burkinabè, Zéphirin Diabré a montré son vrai visage à la suite de la marche du 20 juillet 2013. Qualifié de «valet viscéral de l'impérialisme», Zephirin Diabré n'est certainement pas l'alternative au départ du régime de Blaise Compaoré vus des syndicalistes. Car pour la CGTB, le mal du Burkina n'est pas une question de régime mais de système de gouvernance. Raison pour laquelle, le réveil du peuples est demandé pour mener la véritable lutte «… Car la véritable lutte à mener et qui vaille aujourd'hui par sa dimension salvatrice, c'est celle pour un changement qualitatif, profond, et pérenne pour notre peuple».
A l'endroit de la Filsah
Encore dans le viseur de la Centrale générale des travailleurs du Burkina pour le licenciement annoncé de près de 62 travailleurs dont 10 délégués syndicaux, la Filsah est décidément l'entreprise qui tourmente la CGT-B Hauts-Bassins. Selon Bakary Millogo, le secrétaire général de la CGTB/Hauts-Bassins, l'acharnement de la direction générale de la Filsah ne peut s'expliquer que par sa cuisante défaite lors des élections du personnel du 03 juillet 2013. «Depuis les élections des délégués du personnel intervenues le 03 juillet 2013 où la CGT-B a obtenu cinq (O5) sièges sur les sept (7) alors que l'on lui donnait à peine deux (2), les travailleurs soupçonnés d'être de la CGT-B, font l'objet de décisions discriminatoires dans l'organisation et l'exécution du travail. C'est avec cet état d'esprit que le 05 novembre 2013, la direction générale de la Filsah à travers son DRH, Moussa Fofana, fomente un complot cousu de fil blanc et sous-tendu de provocations grossières autour du licenciement de Béma Sékongo, le seul cadre de Filsah militant de la CGT-B ». S'adressant à l'administration de la Filsah, Bakary Millogo s'est exprimé en ces termes : « que la direction générale de la Filsah se le tienne pour dit : avant elle, Patrick Ledey, ex-directeur général de la Sofapil, Marc Beauquesne, ex-directeur général de la Brakina, Lazare Soré, président général de la Sap, Kam Ollé ex-directeur général de la Sifa avaient juré de liquider la CGT-B dans la zone industrielle de Bobo-Dioulasso». C'est en empruntant Frédéric Engels, éducateur du prolétariat que Bakary Millogo a fermé la page Filsah de son intervention : «Lorsqu'un individu cause à autrui un préjudice tel qu'il entraîne la mort, nous appelons cela un homicide, si l'auteur sait à l'avance que son geste entraînera la mort, nous appelons son acte un meurtre. Mais lorsque la société met des centaines de prolétaires dans une situation telle qu'ils sont nécessairement exposés à une mort prématurée et anormale, à une mort aussi violente que la mort par l'épée ou par balle, lorsqu'elle ôte à des milliers d'être les moyens indispensables, leur imposant d'autres conditions de vie telles qu'il leur est impossible de subsister, lorsqu'elle contraint par le bras puissant de la loi à demeurer dans cette situation jusqu'à ce que mort s'en suive, c'est bien un meurtre. C'est contre ce meurtre que la classe ouvrière réagit depuis toujours. Car face à un meurtrier, toute personne sensée accorde le droit de la légitime défense à l'agressé».
A l'endroit des chefs coutumiers
Les déclarations médiatiques des religieux et chefs coutumiers sur l'incivisme que l'on trouve grandissant au Burkina Faso a du mal à passer à la CGT-B. Dans son message, Bakary Millogo a laissé entendre que l'incivisme ne se résume pas à l'organisation d'une grève, à manifester sur la voie publique ou à s'attaquer aux symboles de l'Etat. Pour lui, «l'incivisme va au-delà de cette considération subjective sinon la majorité des gouvernants de la 4e république, ont été pour la plus part des grévistes sinon des organisateurs de grève. Comment qualifier l'acte ayant fait gicler tout le sang depuis le coup d'Etat du 15 octobre 1987 ? Ce torrent de sang burkinabè n'émeut aucunement nos chefs coutumiers, chefs religieux et consorts. Ce qui les empêche de dormir, ce sont les feux tricolores cassés, les lampadaires cassés, les 4x4 brûlés. Messieurs, les chefs, où et avec qui pensez-vous que ont appris la violence. C'est ce même pouvoir qui a appris aux enfants que seule la violence paie. Dans ce pays, pour être écouté, il faut user de la violence. C'est ce qu'enseignent les dignitaires de ce régime. Alors, adressez-vous à ceux qui manquent de dévouement à la collectivité, qui manquent de civisme et laissez nos enfants tranquille.»
Ousséni BANCE
Lefaso.net