La fibre religieuse est un domaine très passionnel et il faut craindre qu'un débat purement politique de par l'excès d'implication des religieux n'allume un jour un brasier difficile àéteindre. Responsables politiques, ayez le courage d'assumer la laïcité de l'Etat et laissez les religieux à leurs affaires. Restant sauf, bien entendu, leur droit de se prononcer comme tout autre citoyen mais sans y être obligés.
Il n'appartient pas aux religieux de statuer sur l'opportunité du sénat. Si vous voulez dialoguer commencez par les acteurs politiques de tout bord et faites le sur un terrain politique. C'est un échec du politique de toujours revenir sur ces sables mouvants du religieux. C'est de l'amateurisme politique, juste bon pour berner un peuple majoritairement analphabète. Faites votre boulot politique avec des arguments de politiques et arrêtez de demander des bénédictions.
Bien sûr on peut toujours arguer que les religieux sont de précieux recours pour éteindre les incendies des politiques mais excusez-moi d'être d'un autre avis ; c'est un piège dans lequel ils (religieux) ne doivent pas se laisser prendre. La crise sociale au péril de la paix est aussi une donne politique. On peut choisir de payer de sa vie une lutte pour que sa descendance jouisse d'un mieux-être. Si les dirigeants échouent au point qu'il y ait des marches, des révoltes voire des affrontements, les politiques doivent assumer et tirer les conséquences.
Tout se passe dans ce pays comme dans un marché de dupes. Les inconséquences des dirigeants engendrent les conflits sociaux et au paroxysme on fait appel aux religieux pour apaiser les esprits. Notre bonne vielle TeNebreuse et autres média d'Etat nous cassent les oreilles avec des chansons de paix et de tolérance, on noie le poisson avec quelques mesures dilatoires en attendant la prochaine crise. Et le cycle recommence indéfiniment.
Tous ces chantres de la paix et de la tolérance, j'entends ici les religieux, imaginent-ils un moment qu'ils sont les dindons de la farce ? Et pourquoi ne peut-on pas admettre un scénario ou le mécontentement populaire est allé jusqu'au bout pour obtenir des solutions viables voire même balayer les acteurs en place pour permettre à d'autres de proposer une autre donne ? La conclusion est simple, tous ces pompiers d'occasion font consciemment ou pas le jeu du politique qui les utilise a son gré pour se maintenir contre vents et marrées.
Nous sommes tout simplement ridicules dans ce pays, suspendus que nous sommes à la position des religieux. Ou sont les acteurs politiques ? Ce sont leurs arguments et leur engagement qui doivent convaincre, pas la caution morale de tel ou tel leadeur religieux. "Ni en France ni en Amérique" pour citer l'autre, puisqu'ils nous servent hélas de modèles, on ne donne une telle importance à des avis de religieux sur des questions aussi politiques. Imaginez Barak Obama consultant le grand mufti pour faire passer sa reforme sur la sécurité sociale parce qu'en face ses adversaires lui opposent une farouche résistance. Ou Hollande le cardinal Vingt-trois parce qu'il voudrait un avis qui le conforte dans une décision. Encore une fois c'est de l'amateurisme ou de la mauvaise foi.
S'il y a concertation, dialogue ou que sais-je, sur des sujets politiques, il faut faire en sorte que ce soit les politiques qui confrontent leurs arguments. Les religieux ont un impact tout autre sur leurs ouailles. A l'interne ou entre religions ils peuvent malencontreusement être source de conflits. Et ces conflits, il faut le redire, sont de nature très passionnels. "Nous sommes 60%, nous nous sommes cohérents et nous ceci..." peuvent être sources de division profonde entre Burkinabè.
Que Dieu nous en garde.
Charles Ouémenga