Pays membre de la Cedeao, la communautééconomique des Etats de de l'Afrique de l'ouest, le Burkina a des soucis à se faire au sujet de la circulation illégale des armes dites légères et de petit calibre. Selon les experts elles seraient 2 millions en moyenne, pour une population estimée à plus de 17 millions d'habitants. De quoi inquiéter…
L'information avait déjàété donnée par le rapporteur des nations unies chargé des questions de droits de l'homme et de terrorisme. Selon les données contenues dans ledit rapport, plus de 2 millions d'armes illégales légères sont en circulation actuellement au Burkina. Ce que confirme le Colonel Christophe Tapsoba, secrétaire permanent de la Commission nationale de lutte contre la prolifération des armes légères, CNLPAL. Pour lui, il est urgent d'agir afin d'attirer l'attention de tout le monde sur le risque que fait courir une telle situation dans le contexte burkinabè. En particulier sur les atteintes à la quiétude générale.
Mais d'où vient donc le phénomène lorsque l'on sait pertinemment que le Burkina ne dispose pas à l'heure actuelle d'une industrie d'armement, contrairement à d'autres Etats sur le continent ?
Aux sources du phénomène
De l'avis de nombreux observateurs, la période révolutionnaire (1983-1987) a vu des quantités importantes d'armes déversées dans le pays, au nom de la solidarité entre Etats.
Ces armes provenaient selon toute vraisemblance de pays communistes, sans doute convaincus de l'importance de soutenir l'expérience burkinabè dans sa lutte idéologique contre l' « impérialisme ». Dès lors, la conduite était que chaque citoyen devait disposer d'une arme, s'il savait s'en servir afin de défendre la révolution. Avec l'aide d'artisans locaux, le phénomène a été renforcé et a pris de l'ampleur pour donner plus de consistance aux discours révolutionnaires de l'époque.
Malheureusement après la fin de la révolution, une grande partie des armements n'a pas été restituée par les détenteurs. Certains les ayant conservées comme des objets de souvenirs personnels.
La crise sociale et militaire de 2006 a étéégalement une occasion pour faire circuler des armes de manière illicite. Mais c'est surtout la crise de 2011 qui a vu la montée en hausse du phénomène. En effet et outre les armes qui ont été frauduleusement soustraites des casernes et dont beaucoup n'ont pas été retournées, il y a également tous ces civils qui ont décidé de s'acheter des pistolets pour leur propre sécurité. Mais pas toujours dans les conditions requises.
En 2012 la situation au Mali est venue s'ajouter avec ses multiples répercussions sociales et sécuritaires. Globalement l'on estime que 39% du trafic intérieur des armes provient du Ghana, pour 6% du Mali et pour 19% de la Côte d'Ivoire.
Conséquences sociales importantes
Comme on peut le deviner aisément, les conséquences d'une telle situation sont nombreuses. A commencer par les troubles causés chez la grande majorité des populations. Ces dernières années en effet, le grand banditisme montre par exemple, des signes d'une forte recrudescence.
Les braquages à main armée parfois en plein jour et l'arraisonnement de véhicules de transports en commun suivi du dépouillement des voyageurs de tous leurs biens, constitue de plus en plus le lot quotidien des citoyens.
Au fil du temps, certains axes routiers du pays sont passés dans la zone rouge à cause de leur dangerosité. Ce qui ne constitue pas forcément un atout pour les régions concernées. Notamment en matière de promotion des échanges commerciaux et de la libre circulation des personnes. Ce qui oblige les forces de sécuritéà mener des opérations de ratissage dans ces zones sensibles.
Réponse communautaire
La prolifération des armes légères et de petit calibre nécessite une réponse coordonnée à l'échelle régionale si elle veut être efficace. C'est en tout cas le point de vue de la Cedeao.
Celle-ci multiplie les actions en faveur d'une synergie positive (voir article in lefaso.net sur ‘'la convention de la Cedeao sur les armes légères, un document juridique peu connu'') des Etats membres.
C'est dans cette logique qu'il faut situer la création des commissions nationales de lutte contre la prolifération des armes légères et de petit calibre dans chaque pays. Avec pour objectif principal de lutter efficacement contre le phénomène ci-dessus décrit, et « assurer la sécurité, la paix et le développement durable du Burkina Faso ».
La ‘'Cnlpal'' du Burkina, faut-il le noter, a été créée par décret n°20 01-167/PRES/PM/DEF du 25 avril 2001. Les différentes commissions sont appuyées dans leur travail par la société civile à travers le ‘'Rasalao'', le réseau africain sur les armes légères et en Afrique de l'ouest, grâce à ses différentes sections locales. Ces réseaux sont appuyés à leur tour par des réseaux de journalistes et communicateurs.
Bref, une mobilisation de grande ampleur qui témoigne d'une prise de conscience réelle face au danger qui menace l'ensemble de la région.
Former, informer, sensibiliser
L'accent est donc mis sur l'information et la sensibilisation au bénéfice des populations, qui ne connaissent pas toujours la législation en la matière.
Mais plus inquiétant encore lorsque les mauvais comportements sont le fait de personnes qui sont censées faire usage d'armes à feu dans les règles ; mais hélas commettent des bévues en s'en servant à d'autres fins. Ces derniers mois, Ouagadougou a été le théâtre de faits divers tragiques mettant en scène des individus avec des armes à feu. Aussi bien des civils que des agents des forces de l'ordre. Relançant ainsi la problématique d'un débat sur la question.
C'est ainsi qu'à l'initiative de la Cedeao (division des armes légères) et de la ‘'Cnlpal'' Burkina, une session de formation s'est tenue à Ouagadougou du 7 au 9 mai 2013 à l'intention de journalistes d'organes de presse publics et privés du Burkina.
Et comme il fallait s'y attendre, la nécessité d'une meilleure connaissance des textes et surtout de leur appropriation est revenue sur la table.
Outre le Burkina, le Niger et le Mali sont également concernés par cette série de renforcement des capacités.
A Ouagadougou, les participants ont pu mettre à jour leurs connaissances sur le sujet et discuter des enjeux liés au changement de comportement. Il en ressort des propositions d'amélioration au niveau de la sensibilisation du grand public et que la ‘'Cnlpal'' s'est engagée à mettre en œuvre à court terme.
Conditions de détention d'armes à feu
« Avez-vous une arme ? Souhaitez-vous en acquérir ? Elle peut être une sécurité pour vous, mais sachez que l'arme sous toutes ses formes est dangereuse pour vous, votre famille, vos proches et la société. Assurez-vous impérativement que vous êtes en règle vis-à-vis de la législation ».
Ainsi commence le message de présentation de la ‘'Cnlpal'' sur les conditions générales d'acquisition d'armes à feu et des munitions, au titre II du décret N0 2009-301/pres/pm secu/matd/mef/def/mecv/mj/mcpea portant régime des armes et munitions civiles au Burkina Faso.
Quelles sont-elles au juste ces conditions ?
Article8 : L'acquisition d'arme à feu ou de ses pièces et éléments se fait par montage à partir des pièces détachées, achat, échange, donation, legs, ou héritage.
Article 9 : Nul peut acheter une arme à feu ou bénéficier par échange, don, héritage ou legs, s'il n'est titulaire d'une licence appelée ‘'autorisation d'achat d'arme à feu''. L'autorisation d'achat d'arme à feu est personnelle.
Article10 : L'autorisation d'achat d'armes à feu est un document signé du ministre de la sécurité au profit d'une personne physique ou morale en vue de lui permettre d'acquérir une arme à feu.
L'autorisation d'arme à feu vaut permis d'importation
Artcile11 : L'obtention de l'autorisation d'achat d'armes à feu est conditionnée au dépôt d'un dossier de demande à l'adresse du ministre de la sécurité sous le couvert du service de police territorialement compétent ou de l'autorité administrative locale dans les localités où il n'existe pas de service de police.
Article 12 : Tout dossier de demande d'autorisation d'achat d'arme à feu doit comprendre :
une demande sur un formulaire à acquérir auprès du service de police au prix de 1000 francs
le formulaire est revêtu d'un timbre fiscal d'une valeur de 15000 francs pour les armes d'épaule, 25000 francs pour les armes de poing de calibre inférieur ou égal à 7,65mm, 50000francs pour les armes de poing de calibre supérieur à 7,65mm.
une photocopie légalisée de la carte d'identité ou du passeport en cours de validité
un extrait de casier judiciaire de moins de trois mois de date
un extrait d'acte de naissance ou de jugement supplétif d'acte de naissance
un certificat de résidence
deux photos d'identité
En outre lorsque le demandeur est déjà détenteur d'une arme à feu, mention doit être faite sur la demande à laquelle est jointe une copie du permis de détention et de port d'arme. Un récépissé est remis au demandeur pour lui servir de preuve de dépôt de son dossier. Source : Cnlpal
Juvénal Somé
Lefaso.net