« Je sais que je n'ai rien appris des pouvoirs thérapeutiques de mon père. Mais je suis fier d'avoir appris de lui ma langue maternelle ». Ces mots sont ceux de l'aîné d'une famille qui venait de perdre son chef très reconnu pour sa maîtrise des pouvoirs mystiques. «… Je suis fier d'avoir appris ma langue maternelle », a-t-il précisé. La langue est le « cerveau » de ce que nous apprenons de notre société d'origine. Sans elle, rien ne peut nous être enseigné. L'importance de la langue pour un individu n'est plus à démontrer. Elle nous différencie des autres êtres vivants. La langue est « la clé» qui nous ouvre les portes du savoir.
Malheureusement, sous nos cieux, apprendre notre langue maternelle n'est plus une préoccupation. Inlassablement, nous assistons à la disparition de nos langues au profit des langues étrangères. Sans être contre l'apprentissage de langues étrangères, nous gagnerions à avoir nos propres langues comme base d'expression. La situation est malheureusement en train de s'aggraver de jour en jour. Il faut que nous prenions toutes nos responsabilités, si nous ne voulons vraiment pas inscrire des pages négatives de notre histoire. Aucune traduction ne peut rendre fidèlement un message véhiculé dans une langue donnée.
En matière de culture, chaque réalité s'exprime mieux dans la langue à laquelle appartiennent les acteurs. Considérant le système d'apprentissage en Afrique, l'oralité est par excellence, la procédure commune à toutes les communautés. Dans ces conditions, ignorer sa langue maternelle, c'est perdre son identité de prime abord. Les héritiers de la langue de Molière ont vite compris la dangerosité de la disparition d'une langue. C'est pourquoi, ils ont travailléà mettre en place la francophonie. Une institution défendue « becs et ongles », par nous-mêmes. Au lieu de nous inspirer de cet exemple, nous assassinons nos langues. Des linguistes comme Claude Hagège, ont tiré la « sonnette d'alarme » sur le phénomène.
Pour lui, « Nous sommes dans une époque de l'histoire, où les langues disparaissent au plus vite ». En effet, selon la même source, plus de 400 langues sont actuellement menacées d'extinction pure et simple. Des ethnies dont nous taisons volontiers les noms, ne figurent que de nom au Faso. Car ces dernières n'ont plus une langue qui leur est propre. C'est le lieu d'interpeller les acteurs de l'éducation nationale, à redoubler d'efforts dans la promotion des écoles bilingues. Car elles sont incontournables pour l'aboutissement à des langues nationales applicables à tous. Des exemples ne manquent pas pour nous convaincre : le Wolof au Sénégal, l'Achanti au Ghana, sont bien des langues nationales largement parlées par tous. Pour la prochaine fois, nous nous attarderons sur le rôle des parents vis-à-vis des enfants autrefois, en comparaison à celui de ceux de nos jours.
Souro DAO (daosouro@yahoo.fr)
L'Express du Faso