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22 décembre : Matinée noire pour le citoyen Michel Konkobo

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Dans l'écrit ci-après, Michel Konkobo, un citoyen ouagalais, relate les mésaventures qu'il a eues avec des vigiles de Yalgado qui lui aurait fait voir de toutes les couleurs, alors qu'il courait pour être au chevet de sa mère hospitalisée au sein de l'établissement. Le malheur n'arrivant pas seul, M. Konkobo a fini aussi par perdre sa mère. D'où sa colère à l'encontre des vigiles incriminés.

Son récit des faits : « Après avoir cherché en vain un cyber ouvert dans mon quartier la nuit du samedi aux environs de de 22 h, j'ai enfin trouvé une connexion tôt le matin du dimanche 22 décembre 2013, pour partager mon deuil et ma colère avec mes amis internautes. Eh bien, ce matin du 22 décembre 2013 est l'un des plus noirs de ma vie : la veille à 18 h, j'ai perdu ma mère à l'Hôpital Yalgado Ouédraogo. C'est bien la première fois que je dénonce certains faits relevant de ma vie privée, par voie de presse. Mais il le faut, afin que certaines injustices ne se reproduisent plus dans le futur. Je vous retrace le fil des événements.

le samedi 21 decembre , tôt le matin, pendant que je m'apprêtais à aller au travail, j'ai reçu un coup de fil de ma belle-sœur qui m'invitait à venir à la maison en toute urgence. Le cœur battant la chamade, j'ai quitté ma maison, sur la route de Kamboinssin, pour aller en famille, derrière la cité Azimo de Tampouy. En cours de route, j'ai reçu un coup de fil de mon frère : Il faut plutôt aller au CMA Paul VI. Je suis arrivéà Paul VI, mais rien. On avait déféré la vielle aux urgences du CHU Yalgado. Mais, sans ambulance puisque, nous a-t-on fait savoir, il n'y a qu'une seule ambulance à Paul VI, et cette dernière est d'ailleurs en panne. Pendant que Maman convulsait, mon frère et sa femme l'ont emmenée à bord de leur véhicule aux urgences de Yalgado. A notre arrivée, les médecins avaient déjà placé une perfusion. Quelques temps après, autour de 9 heures, on nous a fait savoir que le Docteur visiterait les malades, et qu'une seule personne devrait rester avec Maman. Mon frère était reparti à la maison pour chercher le nécessaire. Sa femme est restée avec notre mère, et nous avons profité, mon ami Ribou et moi, pour sortir prendre du caféà la porte de l'Hôpital. A notre sortie, nous voyions des vigiles barricadant l'entrée. Ils ont répondu à notre salutation. Mais, à peine dehors que mon téléphone s'est mis à sonner. C'était ma belle-sœur qui m'appelait de venir prendre une ordonnance pour achat de médicaments. Nous avons voulu retourner au sein de l'Hôpital, mais les vigiles à la porte nous ont empêchés, d'une manière peu courtoise. J'ai négocié avec eux, les suppliant de me laisser rentrer pour sauver la vie à celle qui me l'a donné. Rien n'y fit ! Ils m'ont exigé un « laisser passer ». « De quel laisser passer vous parlez ? Ou est-ce que l'on peut prendre ça ? », ai-je demandé. « Je ne sais pas », m'a lancé sèchement un des maîtres des lieux, avec des airs de grandeur. Je voyais effectivement des malades et des accompagnants qui présentaient des bulletins d'examen, des ordonnances et autres papiers pour pouvoir avoir accès à l'hôpital. Mais, chose étrange, un Monsieur de type asiatique s'est présenté sur les lieux et a juste dit cette parole : « Je venais rendre visite à un malade ». On lui a ouvert le précieux sésame, sans questionner.

C'est alors que je me suis mis en colère, devant le parterre de patients sur place : « Je veux rentrer prendre l'ordonnance de ma maman. Elle a perdu connaissance et celle qui est dedans avec elle ne peut pas sortir. Laissez-moi entrer ou j'appelle la presse ! »« Tu n'as sûrement pas d'unités. Viens prendre mon portable pour l'appeler », a ironisé un vigile. Tous les vigiles ont alors poussé un rire moqueur. C'est en ce moment qu'un homme robuste, que je crois être un « loubard », m'a appeléà l'écart pour « me raisonner ». Il disait que je devais attendre 10 h avant de rentrer. Je me suis écarté, et je ruminais ma colère avec mon ami. Un médecin, qui voulait en savoir sur le scandale, nous a ouvert les yeux : « Ces vigiles font comme ça pour racketter les pauvres malades ! » Des langues se sont par la suite déliées. Des accompagnants m'ont témoigné avoir été victimes de ces actes peu orthodoxes.

Enfin ! J'ai compris. Pour rentrer et tenter de sauver ma mère, je devais parler aux vigiles. Et ces vigiles s'en foutent pas mal de mes supplications et autres salamalecs. Ils ne mangent pas les « pardon »« SVP », et autres « Merci ». J'ai aussi compris que, selon le bon vouloir de ceux qui se sont taillé une citadelle, voire un royaume devant l'hôpital, certaines personnes pouvaient déroger à« mon œil de règle », parce que la tête de ces dernières leur plaît. A 10h 58, nous voulions rentrer, et c'est avec force et dédain que le vigile nous a repoussés. A 59, bis repetita. Pendant que j'estimais que chaque minute qui passe, est une souffrance atroce de plus pour ma maman. A 10 h pile, les vigiles, pardon, les seigneurs des lieux, se sont décidés à se faire des clins d'œil, et à nous laisser rentrer. Fin de 32 longues minutes d'attente, d'indifférence des vigiles, de cynisme des vigiles. Ma mère a malheureusement rendu l'âme, aux environs de 18h 20. Lorsque, coulant des larmes, j'arpentais le couloir de la sortie, les vigiles sirotaient leur thé. « Nous attendons toujours l'arrivée de vos fameux journalistes », m'ont-ils lancé.

Quelques questions : Quelle formation, quelles instructions l'agence qui s'occupe de la sécurité de Yalgado a-t-elle données à ses éléments ? Au nom de quelle organisation ou de quelles mesures sécuritaires des êtres humains, supposés être les premiers visages consolateurs des âmes meurtries qui arrivent à l'hôpital, agissent-ils ainsi ? Je tiens par contre à remercier de vives voix les médecins des urgences. En particulier, Docteur Sonia Salou, qui a soigné ma mère, comme sa propre maman à elle.

Au milieu de mon deuil, j'ai écrit ce texte, dans l'espoir de corriger une injustice. Une laide injustice ».

Michel KONKOBO, citoyen burkinabè, Web journaliste

mike.konkobo@gmail.com


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