On va se dire des indélicatesses qui ne peuvent attendre
Nous nous sommes donnés à niquer aller et retour
Et le sourire bêta, nous avons applaudi la dépossession
Frères, langer l'espoir éteint
Hier, une liberté curieuse des attentes rassises
Aujourd'hui, une cireuse paix des mares avilies
Etourdissante ronde des larves de la reine
Frères, trier les sourds douleurs
L'éclair déçoit qui encore tranche les instants
Femmes, hommes, enfants et bêtes chancellent
Et la prunelle vitreuse du bourreau étincelle
Frères, taire les angoisses poisseuses
Les âmes aboient dans les décombres
Et là-bas, dans la ruelle nimbée de pénombre
Les gémissements sans écho s'étirent
Frères, apprendre à mettre un cadenas sur sa bouche
On ne peut dire sans voir virevolter
Le glaive ensanglanté du sadique
Ainsi roulent les chagrins chaque fois veufs
Frères, rester à pleurer l'espérance confisquée
Il est possible d'ignorer les femmes
Pas leurs regards larmoyants d'amertume
Jamais leurs silences où flottent les brisures
Frères, accepter la larme qui perle au coin du cœur
Cheminer dans cette contrée aux sourires cruels
Cette ville de demi-vies habillées d'un jour perverti
Aux ivres recoins où sommeillent des colères ternies
Frères, les regarder éplucher l'avenir
Survivants sans lendemain, se terrer derrière ces murs rabougris
Ces frêles remparts d'un banco toujours provisoire
Là où fermentent des haines inexpliquées
Frères, ce n'est pas crime que de trébucher
Mais c'est crime que de continuer à boire le dédain
C'est crime de persister à se déhancher
C'est crime de toujours trembler et démettre demain
La perpétuelle abdication de nous-mêmes
Nous rend comptables de nos déchirures
L'éternelle soumission est un appel au viol
Sayouba Traoré, Journaliste, Ecrivain