Le Collectif des Femmes pour la Défense de la Constitution (CO.FE.DE.C), qui se présente comme un regroupement « des femmes issues de différents milieux politiques, de la société civile, et plus largement toutes les femmes éprises de paix, de justice, de liberté et de progrès » est contre la révision de la Constitution et veut le faire savoir dans ce communiqué de presse. Pour le CO.FE.DEC.C, défendre la Constitution, « c'est promouvoir le respect de la parole donnée, valeur cardinale de la société burkinabè, gage sûr de la promotion du civisme et du respect de la règle de droit ».
1) Etat des lieux
La Constitution est un acte de souveraineté, qui est dans tout pays démocratique, la règle que le peuple se donne à lui-même pour se gouverner. C'est la norme juridique supérieure qu'une ou plusieurs sociétés politiques qui entendent fonder un Etat se sont donné en vue de permettre la réalisation efficace du Bien Commun. C'est pourquoi, après la succession des régimes d'exception, le peuple Burkinabé a adopté, par référendum le 02 juin 1991, la Constitution de la IVème République.
Cette Constitution a fait déjàà ce jour l'objet de 5 révisions plus ou moins opportunes eu égard à l'intérêt général. Si certaines étaient véritablement nécessaires pour adapter la Constitution à l'état de la démocratie dans notre pays, d'autres n'ont servi que des intérêts de groupes limités. Des révisions qui ôtent à notre loi fondamentale son caractère général et impersonnel.
Parmi ces modifications visant des intérêts individuels ou partisans, il est facile de retenir celle de l'article 37 intervenue en 1997 et qui a consistéà sauter le verrou de la limitation du nombre de mandats présidentiels à deux. Or il est établi, depuis Montesquieu, la nécessité dans toute magistrature de compenser la grandeur de la puissance par la brièveté de sa durée. Assurés donc désormais d'un pouvoir à durée illimitée, les tenants du pouvoir se sont rendus coupables de grands écarts condamnables dans la conduite des affaires de l'Etat, amenant le peuple à exiger la restauration du verrou constitutionnel en 2000. Il se trouve en ces jours, que des acteurs politiques veulent remettre gravement en cause cet acquis démocratique.
Fait également partie de cette catégorie de modification à visée partisane, la dernière modification en date, celle de 2012, dont certains aspects visaient les intérêts d'un groupe (création d'un sénat), voire d'un individu (octroi d'une amnistie aux anciens chefs d'Etat).
S'il est vrai que la loi fondamentale doit pouvoir être parfois retouchée pour l'adapter à l'état de la démocratie, elle ne doit cependant pas être malléable à souhait, au gré des majorités parlementaires mécaniques ou par des référendums aux résultats connus d'avance au vu de la fraude électorale érigée en système de pérennisation au pouvoir dans les démocraties tropicales, notamment africaines.
Est-il acceptable de changer constamment les règles du jeu, surtout en cours même de partie ? Comparer ne donne pas raison, mais il est à retenir que depuis 1789 (224 ans en 2013 !), la Constitution des Etats Unis d'Amérique n'a subi que 27 amendements. Pourquoi donc cette oscillation constitutionnelle au Burkina Faso ? La réponse à cette question se trouve sans doute dans la volonté de pérennisation au pouvoir des dirigeants africains. Or, il parait évident qu'on ne peut pas durablement espérer une stabilité politique sans stabilité constitutionnelle.
Par ailleurs, que vaut une norme, même fondatrice, dès lors qu'elle n'est pas vulgarisée, que les sujets censés lui obéir n'en ont pas connaissance ? En effet, en raison de l'analphabétisme et de bien d'autres facteurs, les populations Burkinabé, notamment les femmes dans leur grande majorité, ne connaissent pas l'existence de la loi fondamentale, encore moins son contenu. Constituant la grande frange de cette majorité ignorante, les femmes, 54% de la population Burkinabè ont intérêt à défendre la Constitution, car ce sont celles-là mêmes, avec leurs enfants, qui paient le plus lourd tribut lors des troubles sociopolitiques consécutifs aux manipulations opportunistes de la Constitution.
A un moment où elles peinent toujours à trouver les voies pour influencer les politiques et les décisions dont elles subissent de plein fouet les conséquences, connaître la constitution et la défendre constitue la première garantie pour l'éveil à une véritable citoyenneté et la promotion du genre, facteur de réalisation, comme dit la Constitution, de l'égalité de droit entre hommes et femmes.. En l'espèce les cadres organisationnels animés par les femmes s'adressent le plus souvent aux activités génératrices de revenus, laissant en jachère le domaine de l'approfondissement de la démocratie et la promotion de la bonne gouvernance.
Bien que la plupart des lois fondamentales en vigueur aménagent dans leur préambule la garanties aux droits humains, le constat est néanmoins celui de violations constante des droits humains en contradiction avec le prescrit constitutionnel. Cette morbide tendance à l'infidélité constitutionnelle mérite d'être dénoncée et combattue.
Il en résulte que défendre la Constitution tant dans sa lettre comme dans son esprit, c'est promouvoir le respect de la parole donnée, valeur cardinale de la société burkinabè, gage sûr de la promotion du civisme et du respect de la règle de droit. Il appartient d'abord à ceux-là qui prescrivent les lois d'en donner l'exemple. Mais comme cela ne semble pas être le cas, les femmes, mères et éducatrices ne peuvent que s'emparer du sabre de l'honneur pour porter haut cette valeur refondatrice de notre Faso.
2) De l'esprit du CO.FE.DE.C
Le Collectif des Femmes pour la Défense de la Constitution regroupe des femmes issues de différents milieux politiques, de la société civile, et plus largement toutes les femmes éprises de paix, de justice, de liberté et de progrès. Nous sommes convaincues que l'alternance est essentielle pour la démocratie et nous sommes soucieuses du respect des règles du jeu démocratique dans la conquête du pouvoir d'Etat, lesquelles règles sont définies dans la Constitution de notre pays. Nous avons également la pleine conscience de la nécessité de ne pas changer ces règles du jeu en cours de partie pour préserver la paix sociale dans notre pays.
Notre action visera à promouvoir le respect de la Constitution de notre pays, aussi bien dans la lettre que dans l'esprit de ses dispositions et à s'opposer par les moyens de droit aux tripatouillages pour servir des intérêts partisans. Notre constante préoccupation ne sera que l'enracinement de la démocratie dans notre pays. Nous serons toujours à l'avant-garde de la lutte pour la promotion du genre, la moralisation de la vie publique et la responsabilité au niveau des gouvernants. Notre combat sera sans relâche dans la lutte pour le respect des droits de l'Homme dans notre pays.
3) De la stratégie du CO.FE.DE.C
La stratégie du CO.FE.DE.C repose, aux côtés des autres organisations engagées dans le combat pour l'enracinement de la démocratie au Burkina Faso, sur la mobilisation consciente des populations en vue de protéger les acquis démocratiques garantis par la Constitution.
Le CO.FE.DE.C aura toujours en vue les objectifs suivants :
promouvoir la connaissance et le respect par le plus grand nombre de citoyens de la Constitution de notre pays ;
défendre la loi fondamentale de notre pays contre les tripatouillages partisans ;
contribuer au débat démocratique lorsque la Constitution en est l'objet, dans la perspective de l'intérêt général ;
promouvoir le genre ;
promouvoir le respect des droits Humains garantis par la Constitution et la responsabilité au niveau de l'action gouvernementale.
Le CO.FE.DE.C discutera avec toute personne, toute organisation politique ou de la société civile désireuse d'échanger sur des sujets susceptibles de faire l'objet d'intérêts communs.
Le CO.FE.DE.C, sans être un parti politique, se réserve le droit de participer à tous les débats et de mener toutes les actions, en restant dans le cadre légal, lorsque la Constitution est l'objet du débat ou est menacée.
Par la publication de ce manifeste, nous invitons toutes les femmes du Burkina Faso à nous rejoindre dans ce combat pour l'enracinement, la consolidation de la démocratie et le respect des droits humains dans notre pays.
Le CO.FE.DE.C
Email : cofedecbf@yahoo.fr
Somda Marie Madeleine : 77 76 21 21
Sawadogo Mariam : 70 13 25 55
Minoungou Martine : 71 43 39 60
Conanga Apolline : 77 69 22 22