La planification familiale n'est pas un sujet nouveau. Il date de quelques décennies déjà. L'explosion démographique nationale l'invite à nouveau au cœur des préoccupations. Elle est censée stopper une envolée des naissances qui ruinent bien d'efforts de développement.
La moyenne de six enfants par femme serait trop élevée pour induire un impact sensible de la croissance sur le quotidien des Burkinabè. Il semble que toutes les études montrent que l'indice de développement croît peu si la démographie n'est pas tenue dans une certaine proportion.
C'est ainsi qu'il est expliqué qu'avec le taux de fécondité au Burkina, un taux de croissance économique annuel qui soit en deçà des deux chiffres aurait très peu d'impact.
Le cas du Burkina est d'autant plus crucial que la majeure partie de sa population est jeune, avec une part importante des moins de 15 ans. Aussi, la croissance de la population se trouve-t-elle mise au cœur de la problématique du développement.
Sachant que la satisfaction des besoins de l'enfant, en termes d'éducation, de santé, de nutrition, d'encadrement et de prises en charge diverses, exige de moyens colossaux, inverser la courbe de la fécondité devient un impératif. Le choix pour cette inversion n'est pas optionnel.
Le Burkina désormais à l'obligation de maîtriser ses naissances. Mais comment ? ? Là est la grande question. Pourtant, on ne voit pas les actions des partis politiques pour amener les populations à s'approprier cette problématique.
Les questions politiques plus sensibles que celles du bien-être familial
La structuration de nos partis est telle que les questions essentielles sont traitées en marge, sinon pas du tout. Au moment où fait rage le débat sur le Sénat, on se demande à quand les questions économiques et sociales à deux ans d'une échéance aussi déterminante que la présidentielle.
On aurait compris qu'en dehors de savoir que le succès d'un programme de gouvernement repose sur la prise en compte de l'aspect population, l'opposition actuelle puisse, au lieu de s'arc-bouter contre le Sénat, annoncer au peuple sa dissolution, au cas où il lui accorderait sa confiance en 2015.
Au lieu de cela, elle préfère s'inscrire dans la politique-fiction de savoir à l'avance que le Sénat est le cheval de Troie pour relire l'article 37. On ne peut que se désoler de savoir que notre opposition ait oublié, si ce n'est qu'elle ne sache pas, que le parti politique constitue un moyen à travers lequel, le citoyen a pouvoir de changer la politique d'un pays. Par vocation ou par pratique, l'électeur est attaché aux partis organisés et c'est de là qu'il choisit ses représentants.
Mais peut-il le faire en connaissance de cause, lorsque les férus de l'alternance préfèrent l'accessoire à l'essentiel ? ? Déterminer sa politique, ne suppose-t-il pas pour un parti, d'annoncer ses intentions sur les grandes questions ? ? Même si le sujet de la planification familiale est moins vendable que l'agitation autour de la deuxième chambre, son objectif de donner plus de bien-être familial nous intéresse.
Des débats loin des préoccupations des populations
Peut-être et même sûrement que le débat sur le Sénat ne fait recette qu'à Ouagadougou. En Afrique, l'opposition s'est toujours trompée dans sa stratégie en pensant que la capitale en ébullition peut suffir.
Bien sûr, on comprend qu'ils ont parmi eux, des penchants pour le putschisme, et le putsch n'a-t-il pas son lit majeur dans la ville principale ? ? Si elle pense lancer sa campagne sur le Sénat et aboutir au but, elle occulte un fait majeur ? : le centre de l'électorat ne se trouve pas à Ouagadougou.
Aussi longtemps qu'existeraient les partis politiques, le citoyen restera attachéà ces associations. Il veut les entendre et surtout à propos de leurs besoins existentiels.
Et il n'en fait sûrement pas partie une chambre, qui malgré la noblesse de sa vocation, demeure une institution et comme toute institution, censée ne servir qu'à ceux sachant lire et écrire.
En l'occurrence, prendre les devants par rapport à l'échéance à venir aurait été une stratégie en se souciant d'autres choses que la publicité douteuse disant que le Sénat équivaudrait à la modification de l'article 37.
Maintenant, il est évident que l'opposition n'est pas tenue de rester sur la voie de traiter des sujets d'intérêt. Du reste, il serait vain de l'y obliger, si tant est qu'elle sait déjà où elle va et à quoi elle compte aboutir.
C'est que dans les conditions d'une démocratie normale, ce qu'une majorité a construit, une autre peut bien le détruire, qui nous aurait fait l'économie de ce procès en sorcellerie, que tout ce qui vient d'en face a pour finalité l'article 37. Au démeurant, le débat sur la révision de cet article doit être rapidement vidé.
Sans doute qu'enfin, pourront alors avoir un peu de visibilité, la planification familiale, la mise en place par le gouvernement de sa politique de population et les contre-propositions de l'opposition, les questions sociales d'éducation, de santé et l'adoption d'une assurance maladie universelle. Elles parlent plus aux populations que le Sénat.
Souleymane KONE