A la faveur des assises nationales sur la corruption, qui ont lieu actuellement dans notre pays, nous revenons sur un sujet que nous avons traité dans notre édition N°3195 du vendredi 13 au dimanche 15 janvier 2012. « Politiques, qu'ils soient de la mouvance présidentielle ou de l'opposition, proclament à qui veut les entendre, mettre la lutte contre ce fléau en première ligne de leur combat », écrivions-nous alors. D'où la création d'une multitude des structures de lutte contre la corruption. Créée le 29 novembre 2007 et placée sous la tutelle administrative du Premier ministère, l'Autorité supérieure de contrôle d'Etat (ASCE), devait donner du « tonus »à ce combat.
On est en droit de dire qu'elle n'a pas failli à mission. Nos compatriotes accordent vraisemblablement du crédit au travail de cette structure, au point de presser les plus hautes autorités du pays à donner des suites à ses différents rapports. Le 13 septembre 2012, rendant visite au contrôleur général d'Etat, Bruno Bessin et ses camarades, le Premier ministre Luc Adolphe Tiao l'enjoignait de faire un récapitulatif des structures et personnes soupçonnées de malversations dans les différents rapports.
Cela a été fait avec l'assurance que des sanctions suivraient. C'est dans l'attente de savoir quelles sanctions ont été prises à l'encontre de ces personnes que les Burkinabè, ont été conviés à des « assises nationales » sur la corruption. En a-t-on vraiment besoin ? Pas si sûr ! Il aurait fallu donner de la visibilité aux suites précitées - s'il y en a - et aux recommandations de l'ASCE, pour convaincre les Burkinabè que la volonté politique de lutter contre la corruption dans ce pays est réelle. Or, on semble s'acheminer vers la création d'un autre « machin » de lutte ou de coordination de la lutte contre la corruption. Et si au lieu de tout cela, on travaillait à convaincre les différents acteurs de la lutte contre la corruption de faire leur part du boulot, sans crainte.
Pour ce qui est de la presse, les dernières nouvelles ne sont pas faites pour l'y encourager. En effet, coup sur coup, des organes de presses ont été sévèrement sanctionnés. Le 29 octobre dernier, le Directeur de publication de « L'Ouragan » a été condamnéà 12 mois de prison ferme, 6 mois de suspension de publication et 4 millions de FCFA de dommages et intérêts pour « faits de diffamation, d'injures et d'outrages à magistrat par voie de presse ». Plus récemment, c'est le Conseil supérieur de la communication, organe officiel de régulation de la presse, qui suspendait « Le Quotidien », de publication, du 17 au 23 décembre 2012.
La raison invoquée est la diffusion, à répétition, d'images choquantes. Sans vouloir alimenter une quelconque polémique, force est de constater que ces sanctions tombent à un moment où, après la campagne électorale, les populations vont demander des explications aux gouvernants quant à leurs promesses de combattre sans état d'âme le fléau de la corruption. Et dans la dénonciation de la fraude, la presse est forcément en première ligne. Dans le contexte actuel de nos lois et règlements en matière de délits de presse, ces types de décisions à l'encontre des acteurs de médias, laissent penser à une volonté insidieuse de musellement des médias. Nous ne demandons pas l'impunité pour les hommes et femmes de médias que nous sommes, mais de savoir que nous ne sommes pas infaillibles, et nous accorder quelques « dérapages » inhérents à la faiblesse humaine.
Ceci, pour permettre à ces acteurs de jouer, avec sérénité, leur partition dans la lutte contre la corruption, pour la bonne gouvernance et l'affermissement de la démocratie au Burkina Faso.
Aly KONATE (alykonat@yahoo.fr)
L'Express du faso