Dans cette déclaration, le PDS/METBA, sous la signature de son président, le député-maire Hama Arba Diallo, revient sur les grands événements qui ont marqué la vie nationale, notamment le passage du Premier ministre à l'université, les élections couplées, les délestages, l'insécurité, l'article 37. Une déclaration en date du 31 mars, avant le discours sur la situation de la nation du Premier ministre.
1 – SUR LES EVENEMENTS DU 18 MARS 2013 A L'UNIVERSITE DE OUAGADOUGOU
Le 18 mars 2013, les étudiants de l'Université de Ouagadougou ont réservé au Premier Ministre et à sa suite un accueil plutôt mouvementé auquel ils n'étaient manifestement pas habitués.
Le PDS/METBA estime que ces évènements, qui soulignent le peu de considération que les jeunes portent aux responsables de notre pays est le résultat logique de la mal gouvernance qui caractérise depuis plus de deux décennies la gestion par le pouvoir des problèmes que connaissent l'Université et l'ensemble du peuple burkinabé.
Le Premier Ministre Luc Adolphe Tiao, s'est fait une spécialité de parcourir tout le pays, avec un fort accompagnement médiatique. Le 18 mars, il semblait enfin s'être résolu, deux ans après son arrivée à la tête du gouvernement, à porter quelque intérêt aux graves problèmes de l'Université burkinabé, et à en rencontrer les acteurs.
Tant de retard mis à se pencher sur la situation désastreuse de l'Université, et le peu de temps (45 minutes) prévu pour la rencontre avec les délégués des organisations d'étudiants, ont exaspéré les étudiants. Avec leur franchise habituelle et la fougue de la jeunesse, ils ont dit au Premier Ministre et à sa suite, leur défiance et leur refus de ce qu'ils ont considéréà juste titre comme « une parade du Premier Ministre à l'Université».
L'Université de Ouagadougou et celle de Ouaga II, connaissent une situation lamentable de « chaos généralisé….. sur un fond de retard jamais égalé dans l'exécution des activités académiques ». Les infrastructures (amphithéâtres, salles de cours, locaux de l'Université Ouaga II, laboratoires, cités, etc.) sont en retard de plusieurs années. L'introduction forcée du système LMD a créé« un désordre indescriptible » et le « désarroi » chez les étudiants. Actuellement, en fin mars 2013, on trouve à l'université des étudiants qui achèvent leur année universitaire 2010-2011, d'autres leur année 2011-2012, et d'autres encore attendent de débuter leur année 2012-2013.
Pour plus de 50 000 étudiants qui vivent à Ouagadougou, il n'y a que 2010 lits en cité universitaire. Durant l'année 2011-2012, 3972 étudiants seulement ont bénéficié de la bourse. Une minorité (4 000 environ) peut prétendre au bénéfice de l'aide (150 000 F/an) ou aux prêts remboursables du FONER (5 000 étudiants environ).
Depuis le début, le pouvoir de la IVème République n'a jamais perçu les étudiants et leurs organisations représentatives que comme des adversaires à abattre, contre lesquels il fallait rapidement envoyer les forces de répression.
Infantilisant les étudiants, le pouvoir les a régulièrement accusés d'être « manipulés par des partis d'opposition » et d'être « le bras armé» du Collectif contre l'impunité. En 2008, après avoir supprimé les cités construites sur le campus de l'Université de Ouaga (UO), le Président de l'Université a obtenu et maintenu la présence permanente d'une police de l'Université qui n'a disparu qu'à la faveur des révoltes sociales de février à mai 2011.
Le vrai problème, c'est que le gouvernement n'a pas de politique propre pour le développement des Université d'un pays qu'on présente cependant comme «émergent » !
C'est pourquoi il y'a de tels retards dans le programme de recrutement des professeurs (500 pour toutes les Universités du pays), de réalisation des infrastructures, de réforme du système de l'enseignement, du déroulement des années académiques, etc. Dans l'impossibilité de supprimer l'Université, la seule stratégie du pouvoir est de contenir et de maîtriser les ardeurs contestataires et revendicatives de ses étudiants. C'est pourquoi aussi, dès que les étudiants « bougent », le gouvernement les vide des cités et suspend les prestations du CENOU pour les acculer à la misère et à la mendicité. Cela n'empêchait pas l'ancien Ministre de l'enseignement supérieur, lui-même professeur à l'université, de répondre aux députés qui l'interrogeaient : « Tout baigne dans nos universités » !
Dans la conférence de presse qu'il a tenue le même jour dans ses bureaux, le Premier Ministre, reprenant les engagements déjà pris depuis plusieurs années (infrastructures à réaliser, professeurs à recruter) a annoncé en outre une mesure de « blanchiment technique » pour supprimer le chevauchement des années académiques.
Sur le sérieux et l'intérêt de ces promesses et mesures, il convient de faire preuve de la plus extrême réserve, en raison d'une part de l'expérience passée, mais d'autre part parce qu'aucun dialogue n'a été au préalable engagé sur ces questions avec les étudiants et les professeurs qui sont les premiers concernés.
Le PDS/METBA estime qu'il est plus que temps de mettre fin à cette politique anti-intellectuelle et irresponsable à l'Université, véritable sabotage de la formation universitaire, qui compromet délibérément la formation de nos jeunes cadres et le développement de notre pays.
2 – SUR LES ELECTIONS DU 02 DECEMBRE 2012 ET LEURS PROLONGEMENTS
Les élections couplées du 02 décembre 2012 ont montréà quelle hauteur le parti majoritaire CDP pouvait organiser la fraude et la corruption électorales. Jamais les partis n'ont déposé autant de plaintes pour fraude électorale, devant les tribunaux administratifs ou le Conseil d'Etat. L'annulation par ce dernier des résultats avec obligation d'y reprendre le scrutin, dans 691 bureaux de vote sur les 14 699 ouverts, indique sans conteste l'étendue de la fraude, et son caractère systématique car elle n'a pratiquement épargné aucune province.
Il a fallu attendre la reprise des élections municipales complémentaires, le 17 février 2013, pour connaître la répartition définitive des conseillers municipaux. Le CDP qui avait centré toute sa campagne électorale sur l'image de Blaise Compaoré et de sa promesse démagogique et ridicule d'un « Burkina émergent », sera une nouvelle fois le grand vainqueur de ces municipales.
Le PDS/METBA pense que la CENI, la société civile et toutes les forces politiques et sociales devraient se rendre à l'évidence : malgré le progrès qu'a représenté la biométrie, beaucoup reste encore à faire pour extirper l'esprit de fraude, de corruption électorale et de combines malpropres dans les rangs des hommes politiques au pouvoir.
3 – SUR LES DELESTAGES PERMANENTS A OUAGA ET BOBO
Nouvelle illustration de la mal gouvernance et de l'improvisation qui caractérisent la gestion du pays par le gouvernement, les délestages se sont systématiquement installés depuis le début de mars dans les divers quartiers de Ouagadougou et de Bobo-Dioulasso.
Le ministre de l'énergie, lui-même directeur général de la SONABEL pendant plus d'une décennie, a tenté d'endormir la vigilance des usagers, en prétendant d'abord que les coupures n'étaient que temporaires, puis qu'elles étaient dues à des contraintes extérieures, puis qu'il s'agissait d'une insuffisance très temporaire des capacités installées qui devait être palliée très rapidement. Et pourtant, les habitants de Ouagadougou et de Bobo-Dioulasso continuent de subir le calvaire des longs délestages !
Ici comme dans d'autres domaines, le gouvernement a manqué de prévoyance et de décision. Il n'a pas vu venir l'accroissement démographique des grandes villes, il n'a pas su anticiper la croissance de la demande. Les conséquences sont aujourd'hui ces longues coupures d'électricité, d'autant plus nuisibles que beaucoup d'entreprises, d'ateliers et de bureaux ne peuvent travailler sans électricité, que l'on est actuellement en période de chaleur, et qu'aujourd'hui comme hier, la SONABEL parait incapable de respecter son programme de délestage.
Le PDS/METBA considère qu'ici comme ailleurs, à l'exemple de ce qui se fait dans les pays véritablement démocratiques, le gouvernement doit sanctionner sans faiblesse, en démettant de leurs fonctions, les auteurs de ces fautes de gestion dans un domaine aussi capital que l'énergie. Car ils font directement subir à toute la population et à l'économie du pays, les conséquences de leur imprévoyance et de leur incurie. Et que le pouvoir arrête de nous infantiliser en cherchant à nous faire croire que nos problèmes énergétiques viennent toujours de l'extérieur !
4 – SUR LES PROBLEMES DE SECURITE QUI PERSISTENT ET MEME S'AGGRAVENT
L'insécurité s'est installée depuis une vingtaine d'années sur nos routes et dans toutes nos villes. Aucune province, aucune commune ne sont épargnées, même si certaines en souffrent encore plus que d'autres.
Pourtant les divers gouvernements de Blaise Compaoré ont promis à plusieurs reprises d'éradiquer rapidement les coupeurs de route et ceux qui dans les villes, volent, escroquent et tuent parfois pour presque rien les paisibles citoyens pour les dépouiller des biens qu'ils ont amassés à la sueur de leur front. Malgré les multiples stratégies annoncées à grands coup de publicité, les problèmes de sécurité persistent et même s'aggravent ! Leur ampleur et leur gravité ont, ces dernières semaines, obligé le gouvernement à organiser une opération combinée de la gendarmerie, de la police et de l'armée de l'air pour tenter de déloger les coupeurs de route des provinces du Koulpelogo et de la Gnagna. Encore une « opération commando »qui ne saurait constituer une solution permanente aux problèmes récurrents et quasi structurels de l'insécurité au Burkina Faso.
5 – SUR LES REVENDICATIONS SYNDICALES QUI S'ACCUMULENT SANS SOLUTION
Depuis le début de l'année 2013, aucune semaine ne se passe sans que les travailleurs ne manifestent leur ras-le-bol quant aux conditions de travail ou de rémunération qui leur sont imposées et n'engagent une action pour obtenir satisfaction. Durant le seul mois de mars 2013, on peut noter parmi celles qui ont été relatées par la presse, les actions des travailleurs de ECOBANK, de BRAKINA, des enseignants de la région du Centre Ouest, des étudiants du Centre Universitaire Polytechnique de Dédougou, des étudiants de l'Ecole supérieure d'informatique de Bobo-Dioulasso, etc.
Mais le gouvernement demeure sourd et indifférent à toutes ces manifestations sociales motivées soit par l'arbitraire des patrons de certaines boites privées, soit par les conditions de vie et de travail que lui-même impose à ses fonctionnaires et à ses étudiants.
Pour le PDS/METBA, le pouvoir de Blaise Compaoré et son gouvernement sont responsables du pourrissement de la situation sociale, de l'absence pratique du Code du travail qui n'assure plus la protection des travailleurs dans le privé, et de la « chienlit » dont profitent certains patrons privés, venus se faire de l'argent à bon compte en pressurant au maximum les travailleurs burkinabé. Le gouvernement doit respecter sa propre législation du travail, et prendre impérativement des mesures pour faire respecter par le privé cette législation.
6 – SUR LE RETOUR DES DEBATS AUTOUR DE LA REVISION DE L'ARTICLE 37
Ces dernières semaines, on note le retour tout à fait orchestré du débat sur la révision de l'article 37 de la Constitution qui limite à deux le nombre de mandats présidentiels consécutifs qu'une même personne peut exercer.
On croyait pourtant qu'après l'échec flagrant de la tentative d'inclure cette révision parmi les réformes politiques à suggérer par le Comité consultatif pour les réformes politiques (CCRP), il était clairement entendu qu'elle était très largement jugée inopportune, jusque dans les rangs de la mouvance présidentielle.
Mais il parait maintenant très clair que le chef d'orchestre du chœur des « révisionnistes de l'article 37 », très personnellement intéressé par cette révision, n'y a pas renoncé. Dans sa nouvelle stratégie, Il s'agit actuellement pour lui, sous le prétexte d'«écouter la voix du peuple souverain », de faire accepter la procédure du référendum populaire. Il pense sans doute, qu'en usant comme par le passé, de la corruption électorale à grande échelle et en s'appuyant sur le zèle servile de l'administration, le bon peuple burkinabé voterait n'importe quoi, y compris la révision de l'article 37. Et cela devrait lui assurer la présidence à vie, lui qui aura déjà exercé le pouvoir pendant 28 ans.
Pour nous du PDS/METBA comme pour tous les démocrates, l'attitude à avoir dans cette situation est claire : nous sommes contre une telle révision de l'article 37 de la Constitution ! Et nous en témoignerons en toute occasion, fidèles en cela au large consensus acquis au référendum constitutionnel du 02 juin 1991 autour de l'actuelle loi fondamentale ! Nous mettons en garde le pouvoir contre toute révision régressive de l'article 37, tendant à substituer au consensus acquis, une éventuelle majorité (politiquement inférieure au consensus), avec les clivages et les conséquences sociopolitiques inimaginables aujourd'hui.
CONCLUSION
Le peuple burkinabé a su toujours distinguer entre les gouvernements qui sont effectivement mobilisés pour apporter des solutions à ses problèmes et les autres. Il sait aujourd'hui que les divers gouvernements de Blaise Compaoré n'ont pas d'autre programme que de travailler à le maintenir à la tête du pouvoir, coûte que coûte. C'est pourquoi, il lui importe peu que les membres du gouvernement donnent dans la mal gouvernance, n'aient pas de politique cohérente dans leur département, aient de mauvais taux de réalisation de leurs programmes et projets, couvrent des mauvais gestionnaires, gèrent de façon désastreuse les ressources mises à leur disposition, cultivent l'impunité, etc.
Au total, le Burkina Faso est mal gouverné. Son Université est en crise depuis au moins vingt ans. Ses infrastructures scolaires, sanitaires, routières, énergétiques, hydrauliques et de télécommunication sont largement dépassées par les besoins. Les équipements collectifs (sportifs, culturels, artistiques) sont pratiquement inexistants. Il n'y a pas de sécurité dans les villes dès que tombe le soir ni sur les routes. La croissance constatée, due d'abord au travail des hommes et des femmes ainsi qu'au développement des productions d'or (orpaillage et mines), n'a qu'une faible incidence sur l'amélioration du niveau de vie des citoyens.
Et cela en raison de la mal gouvernance, de la mauvaise gestion, de l'enrichissement illicite de certains et de l'accaparement des ressources par une minorité pressée d'en jouir, peu soucieuse des conséquences de ses agissements sur l'avenir du pays.
Blaise Compaoré n'a pas de solution aux problèmes du pays. En 2015, terme de son mandat, il aura exercé le pouvoir pendant 28 ans sans interruption. Il devra partir et non pas multiplier les ruses et les trahisons de la Constitution pour s'incruster au pouvoir.
Par sa politique et ses engagements, le PDS/METBA est responsable devant le peuple de la défense des intérêts de ce dernier. Ensemble avec les autres patriotes, il dénoncera et luttera constamment pour mettre fin à la mauvaise gouvernance au Burkina Faso.
Ouagadougou le 31 mars 2013
Pour le BEN du PDS/METBA,
Le Président,
Hama Arba DIALLO