Notre confrère du Journal du Jeudi parle d'élection « contre nature ». Les analystes politiques l'expliquent difficilement. Puisque ça ne répond à aucune logique. Et pourtant, le fait est là, implacable et interroge les consciences sincères.
Des conseillers municipaux de l'Union pour le progrès (UPC) ont contribuéàélire un maire issu du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), alors qu'ils sont majoritaires dans la même commune. Dans l'autre sens, des conseillers municipaux du CDP ont élu à la tête d'une commune un maire issu de l'Alliance pour la démocratie et la fédération/Rassemblement démocratique africain (ADF/RDA), là où ils ont la majorité absolue. Et vice-versa. Aux seins des formations politiques, on ne comprend plus rien. Quand bien même des accords existent entre certains d'entre eux. Et pourtant, le fait est bien là. Et la question est pertinente quand au sein des mêmes partis, on se demande s'il faut perdre la présidence d'une mairie dans laquelle on est majoritaire. A cette question, aucun parti n'ose donner d'explication. Car le principe voudrait qu'une fois qu'on a remporté l'élection dans une commune, on en assume la gestion. Et ce, conformément au choix des électeurs. Dans la mesure où l'élection municipale est une élection de proximité, permettant ainsi aux citoyens d'une commune de porter leur choix sur des individus investis par des partis politiques. En d'autres termes, si des individus ont étéélus, ce n'est pas forcément à cause de leur représentativité ou de leur crédibilité, mais celle du parti politique dans lequel ils militent. Et qui, très souvent, leur donne les moyens de battre campagne et de remporter la victoire. C'est dire donc que les citoyens accordent en premier lieu, leur voix à un parti politique et non à des individus. Et cela est d'ailleurs corroboré par le mode de scrutin qui est celui de liste où l'obligation est faite à tout candidat d'être investi par un parti politique pour prétendre concourir à une élection locale.
Malheureusement, une fois élus, des conseillers et des députés en font à leur tête. Le parti politique sous la bannière duquel ils ont étéélus, ne les intéresse plus. Le choix des électeurs non plus. Ce qui les intéresse, ce sont leurs intérêts et seulement leurs intérêts. N'est-ce pas ce qui explique les excitations à outrance et l'engouement jamais égalé autour des élections des maires de communes et d'arrondissements en ce moment ?
Heureusement (pour les partis politiques) et malheureusement (pour les élus trop ambitieux), aucun parti ne va accepter perdre le contrôle d'une mairie où il a reçu le mandat des électeurs. Tous ceux qui, pour leurs propres intérêts auront trahi leur parti, peuvent donc se tenir tranquilles. Sur la question, tous les partis devraient d'ailleurs s'accorder exactement comme ils l'ont fait par rapport au nomadisme politique en mettant en place un dispositif qui permet la stabilité des groupes parlementaires. Ce n'est pas parce qu'un individu a des ambitions, souvent sans limites, qu'il doit compromettre le développement de toute une commune. Les textes des partis politiques ne suffisant plus pour discipliner certains militants, il va falloir réfléchir à un dispositif réglementaire. La démocratie, ce n'est pas la pagaille. Il y va de l'avenir de notre pays. Aussi, faut-il comprendre que face à la situation, des partis aient pris des mesures, comme celle qui consiste à présenter à la sortie de l'élection du maire, les bulletins qu'on n'a pas mis dans l'urne. Pour donc éviter ce genre de contraintes, il est mieux d'encadrer sérieusement par de nouveaux textes, l'élection des maires. On pourrait par exemple, demander au parti politique ou groupe de partis politiques qui est majoritaire de composer directement son exécutif local, tout en tenant compte des sensibilités politiques ou sociales qui sont représentées au sein du conseil municipal. Au moins, on aura la conscience tranquille, puisque le choix des électeurs aura été respecté. Avant tout, ce sont bien eux qui font le développement à la base !
Dabaoué Audrianne KANI
L'Express du Faso