Au Burkina Faso, et ce n'est que pure réalité, le débat sur la peine de mort divise l'opinion publique. Figurant dans le Code pénal, cette sentence est toujours prononcée par les juridictions burkinabè, même si les dernières exécutions de condamnés à mort remontent à 1988, selon nos informations. Et l'application de la peine de mort, dit-on dans le milieu judiciaire, a un effet dissuasif. Elle aurait un impact sur la vie de la société, en ce qu'elle permet de baisser la criminalité et de lutter contre le terrorisme. Les crimes passibles de la peine de mort sont, entre autres, l'espionnage, les parricides, les empoisonnements et l'assassinat. Appliquée par fusillade au Burkina, en un lieu désigné par le ministère de la Justice, devant un certain nombre de personnalités (procureur général, régisseur, médecin…), la peine capitale concerne au premier chef, les adultes.
Les mineurs, qui agissent par discernement, ne sont pas aussi épargnés. L'exécution du condamnéà mort, faut-il le savoir, ne se fait pas un dimanche ou un jour de fête. Les femmes enceintes sont exécutées après leur accouchement, comme le stipule la loi. Au-delà de ces aspects, retenons que le corps du supplicié n'a droit à aucun honneur posthume et que la violation de cette disposition est passible d'amende.
On le voit, la peine de mort est une sentence, qu'il ne faut pas souhaiter à son ennemi juré, encore moins à un parent. Mais la loi c'est la loi, dit-on. Dès lors, l'on comprend pourquoi, une quinzaine d'Organisations de la société civile, regroupées en coalition, luttent pour l'abolition de la peine de mort au Burkina. Formant un front, des structures, tels qu'Amnesty International-Burkina et le Mouvement burkinabè des droits de l'homme (MBDHP), brandissent comme principal argument, le droit à la vie, garanti par la Constitution burkinabè. Ceux qui sont contre la sentence suprême disent également qu'elle est contraire aux engagements internationaux du Burkina. En effet, nos dirigeants ont ratifié le Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1989, qui consacre également le droit à la vie.
Seulement, le deuxième Protocole facultatif de ce traité, qui oblige tout Etat signataire à ne plus condamner à mort une personne, n'a pas encore été adopté au niveau national. Pour autant, les acteurs de la lutte pour l'abolition de la peine de mort ne baissent pas les bras. Ils mènent régulièrement des plaidoyers en direction des autorités compétentes et du Parlement, afin que la pratique soit abandonnée. Et chaque 10 octobre, Journée mondiale contre la peine de mort, constitue une occasion pour eux de faire le point de la lutte et de peaufiner de nouvelles stratégies. Mais en attendant l'aboutissement du projet, certains pointent du doigt « l'hypocrisie » du législateur qui, selon eux, maintient toujours la peine de mort, quand bien n'étant plus appliquée depuis près de 25 ans, pour « faire plaisir »à une certaine opinion.
Allons-le savoir. Ce qui est sûr, c'est que le Burkina enregistre des condamnés à mort, dont les peines sont communiées à la prison à vie, dans les faits. Toute chose qui n'est pas pour déplaire à ceux favorables à la peine de mort. Ceux-ci ne veulent pas entendre parler de son abolition, car, estiment-ils, celui qui ôte la vie doit subir le même sort. Partisans de la loi du Talion (œil pour œil, dent pour dent), les intéressés ne passent pas par moult tournures pour saluer l'existence de la peine capitale. Et les arguments pour défendre pareille position ne manquent pas. « Si on tue un de mes proches ou de mes amis, je ne voudrais pour rien au monde que son bourreau vive encore », a-t-on souvent entendu par ci. « Celui qui tue ne doit inspirer aucune pitié. Il doit être exécuté aussi », a-t-on soutenu par là. Et les défenseurs de la peine de mort n'hésitent pas à demander au camp d'en face de se mettre à la place des familles des victimes pour mesurer la pertinence de leurs arguments. Faut-il abolir la peine de mort au Burkina ? Difficile donc de trancher. A chacun son avis !
Kader Patrick KARANTAO (stkaderonline@yahoo.fr)
Sidwaya