
La crise née du projet hasardeux de la modification de l'article 37 qui a conduit à l'insurrection populaire des 30 et 31 Octobre 2014 et qui se poursuit dans la période de la transition aurait mis à rude épreuve les leaders politiques. Certains qui ont été commis à la défense des intérêts de leurs partis politiques ont brillé tristement par des déclarations qui contrastent avec leur rêve d'être des rassembleurs du peuple et des gestionnaires de la citée.
Le ton fut donnée par les indécrochables du CDP, les « tout-puissants » d'hier. « S'ils brulent vos maisons, bruler les leurs » (Assami Koanda). Pour rassurer ses co-militants que personne ne pouvait leur ravir la victoire, un autre membre du secrétariat exécutif de l'ancien parti majoritaire, aurait déclaré que, en tout état de cause, ils sortiront vainqueurs, car les armes du pays seraient à eux. En son temps, tout portait à croire que les puissants d'hier étaient les seuls potentiels va-en-guerre dans la république. Tous, l'ancienne opposition et la société civile les ont condamnés unanimement en dénonçant leur soif inavouable du pouvoir. On croyait qu'ils seraient les seules « stars » de l'arrogance et de la violence dans le verbe.
Depuis le renversement de la situation à l'issue de l'insurrection, les surprises malheureuses se dévoilent. D'autres vedettes de l'arrogance par le verbe montent sur scène. Dans les lignes du journal « Jeune Afrique », Ablasseé Ouédraogo, ancien ministre des Affaires étrangères aurait décliné ses atouts pour gagner les élections présidentielles à venir : « J'ai toutes mes chances de devancer, au soir du 11 octobre (2015), mes concurrents à cette présidentielle. J'ai trois atouts principaux. Je suis Moagha du plateau central, et les Mossis sont une forte composante du Burkina Faso. Je suis aussi musulman, ce qui n'est pas rien dans un pays où 70% des gens le sont également…».
Toute la société s'accorde pour condamner ce jeu dangereux auquel il s'est livré, car ses déclarations risqueraient de mettre le feu à la paille du toit national, n'eût été la maturité du peuple. Il s'est jeté en proie facile à tous ses opposants qui ne voudraient pas rater l'occasion de le clouer sur la croix de ses propres propos « ségrégationnistes » ; mais qui aurait imaginé une autre prestation malheureuse. Un des leaders du MPP, Yamba Malick Sawadogo, un ancien sankariste, qui a témoigné avoir participéà l'enterrement du Héros Thomas Sankara, lui-même emporté par la violence, aurait lancé ceci a ses potentiels électeurs : « préparez vos fusils, munitions, couteaux pour accompagner Rock à Kossyam ».
Je n'évoque par tous ces cas pour remuer le couteau dans la plaie, mais juste pour convenir qu'a quelque chose malheur est bon. Ces sorties malheureuses nous révèlent une chose certaine, des politiciens moins soucieux du bien réel du pays seraient prêts à tout pour la conquête du pouvoir. « Ces gens sont prêts à bruler le pays pour chauffer leur café». (Norbert Zongo)
Il est temps de se regarder dans le miroir et nous aviser davantage que nous ne sommes pas à l'abri de ce dont les autres pays ont été victimes « les conflits ethniques nés des calculs égoïstes des politiciens ». On me répliquerait que les pays ne sont pas pareils, mais attention, les mêmes causes produisent les mêmes effets. Je suis de ces avis qui conviennent qu'il faudrait en parler pendant qu'il est temps afin d'éviter le pire dans l'avenir. Ne dit-on pas que mieux vaut prévenir que guérir ? Il ne faudrait pas attendre d'avoir le fantôme dans la maison avant de fermer la porte. Face à des dérives pareilles, chacun, à son niveau devrait agir pour préserver la paix sociale.
Les auteurs de ces déclarations doivent en toute humilité et avec sincérité demander des excuses pour donner des signaux forts qu'ils sont tombés mais ils ne voudraient pas rester couchés. L'erreur est humaine dit-on, mais le pardon est divin. C'est au prix de leur aveu que le peuple pourra leur témoigner de sa tradition légendaire, sa disponibilitéà pardonner pour permettre une « vie » nouvelle.
Le rôle du peuple face à des bergers aux apparences de loups, le peuple vaillant et unit du pays devrait être sa propre sentinelle. Nous devons faire preuve de maturité digne de l'intégritéà laquelle aspire notre pays, pour ne pas nous laisser empoisonner par des hommes et des femmes qui voudraient nous exploiter mortellement afin d'assouvir leurs besoins. Nous ne devrions pas nous faire le mouton, pour encourager des « politicien-boucher »à nous dépiécer.
Sur ce, l'action entreprise par le ministre de l'Administration Territoriale est à féliciter : les auditions des auteurs. Notre pardon devrait s'accompagner de mises en garde fermes pour éviter tout dérapage dans le futur. Le peuple, devrait utiliser des stratégies efficaces, fondées sur la valeur sacrée du pardon en vue de ramener efficacement et filialement les brebis galeuses dans la bergerie. Nous formons avant tout une même et seule famille dans laquelle nous devons nous éduquer mutuellement au respect des principes républicains, source et garantie d'une paix durable.
Il serait de l'intérêt de tous, que les leaders politiques de notre pays fassent leur, la philosophie populaire moaga qui dit que « l'alcool est à boire, mais les mots sont à manipuler avec sagesse ». Que celui qui ne se sent pas confortable à la prise de la parole en public ne s'essaie pas à cet exercice apparemment banal mais au fond, très complexe. Travaillez en collaboration avec vos services de communication. En cas de nécessité, n'hésitez pas à recourir au service des « speech-writters » (rédacteurs de discours). Ce n'est pas humiliant que d'exploiter les expertises d'autrui pour mieux exprimer dans les règles requises, ses opinions politiques. En tout état de cause, ayez comme réflexe, la mise en garde suivante « la parole ressemble à la paille d'un toit, il est facile de la soutirer mais il est très difficile de la remettre à sa place initiale ». Les partis politiques devraient veiller à ne pas choisir n'importe qui pour être son porte-voix. Celui qui n'a pas un discours rassembleur parce qu'en cours d'idées constructives ou de projet de société consistant, n'hésitera pas à tirer sur les ficelles de l'ethnie /religion et de la violence. En s'illustrant de la sorte, il serait un pire ennemi du Burkina et un virus mortel plus dangereux que celui de l'Ebola, pour la nation.
Nos différences ne sont pas des obstacles mais des richesses. Le Burkina Faso est une terre qui nous a été léguée par nos ancêtres. Le défi de chaque génération est de travailler à consolider l'unité et l'union nationale sans lesquelles, cet héritage volera en éclat. Le premier rôle de la politique en tant que le plus « vaste champ de la charité sociale », est de veiller à un Burkina qui s'enrichit de ses différences et de la multiplicité des ethnies qui le composent.
Pour y arriver, les partis politiques devraient éduquer leurs militants à la patience de ne pas voir en nos petites différences, des murs, mais « des ponts à jeter pour favoriser la rencontre dans un dialogue fécond et respectueux des convictions de chacun » (Cardinal Philippe Ouédraogo). Sur la base de la Constitution, notre appartenance commune à la nation précède royalement nos identités ethniques et religieuses. Alors, que ces facteurs secondaires ne soient pas dangereusement exploités pour détruire notre dénominateur commun, notre pays, le Burkina Faso. La politique doit éduquer a l'amour et non à la ségrégation.
Vive le Burkina qui bannit toute forme de haine, de ségrégation ; un pays riche de ses différences, un Burkina intemporellement indivisible pour le bonheur et l'honneur de ses fils et filles.
Un fils du Burkina,
Sibiri Nestor SAMNE
sasimastor@hotmail.com