« Un vieillard, même couché voit plus loin qu'un jeune débout », a dit le Professeur Joseph Ki-Zerbo. A travers cette phrase, le sage Professeur veut bien dire que quelle que soit la vieillesse et les contraintes d'un vieux, il est plus sage et apte à faire face à plusieurs difficultés qu'un jeune sans expérience, plein de fougue et bardé de diplômes. En opposant ainsi la sagesse et la fougue sans sagesse, Ki-Zerbo veut attirer l'attention sur le fait qu'entre jeunesse et vieillesse il n'y a que de la complémentarité. Ne dit-on pas que si jeunesse savait, si vieillesse pouvait ?
Aussi, il me semble que nous sommes dans un tournant décisif au Faso quand on observe les ambitions et les façons dont certains changements ou nominations se font. Que ce soit dans les partis politiques, dans l'administration publique ou même dans le privé. En effet, au sein des partis, on a “chanté”à qui veut entendre, qu'il faut donner plus de place aux jeunes. Non, il faut donner aux jeunes la place à laquelle ils ont droit. Quand on dit plus de places, il y a nuance. Au détriment de qui faut-il donner plus de places aux jeunes ? Il en est de même quand on dit qu'il faut donner plus de places aux femmes. Au détriment des jeunes ou des hommes ? Question.
Dans l'administration publique, depuis maintenant quelques années, il est question de promotion des jeunes talents. Le dernier exemple est celui qui vient de se passer au ministère de la Communication. Où, comme dirait l'autre, on a « décapité» pratiquement toutes les directions en remplaçant des « anciens » ( ?) par de plus jeunes. Il faut peut-être comprendre ici « anciens » parce qu'ils ont déjà occupé des postes de responsabilités, sinon, certains d'entre eux ne devraient pas avoir occupé les responsabilités qu'ils viennent de quitter. A cause de leur âge et de leur expérience par rapport à d'autres qui sont plus anciens qu'eux dans la profession. On ose croire qu'on a mis les hommes qu'il faut à la place qu'il faut. Ensuite, il faut souhaiter que les plus « anciens » acceptent de collaborer franchement avec les plus jeunes. Afin d'éviter ce que nous appelons abusivement le « choc des générations ».
Pour tout dire, il ne devrait pas s'agir dans le remplacement des effectifs, que ce soit dans les partis politiques ou dans l'administration, d'enlever des anciens et asseoir des jeunes. Sans tenir compte du fait que les jeunes ont besoin de l'expérience des plus anciens pour réussir leur mission et qu'en retour les anciens ont besoin des jeunes pour porter plus loin leurs actions. Le sujet n'est pas tabou et il faut oser en parler. Des partis politiques tels que le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), dans son souci de rajeunissement des effectifs, avaient pensé qu'il serait très facile de « mettre de côté» les dinosaures. Il a fallu, pour les élections municipales et législatives couplées, faire marche-arrière par endroits pour se reposer sur l'expérience des plus anciens. Il devrait également en être ainsi dans l'administration. Ne dit-on pas aussi que l'expérience vaut mieux que la science ?
Il est vrai qu'avec les Nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC), il est difficile de travailler aujourd'hui sans des outils indispensables comme l'ordinateur et tout ce qui tourne autour. Que malheureusement beaucoup d'anciens ne maîtrisent pas. Est-ce pour autant qu'ils doivent faire de la place ? Pas si sûr. Ce qui est plus évident et important, c'est de faire en sorte qu'il y ait plus de symbiose entre les deux générations et permettre ainsi la bonne marche et la réussite des actions.
Dabaoué Audrianne KANI