L'information est tombée en milieu de matinée ce lundi 11 février. Comme un « coup de foudre dans un ciel clair », le Pape Benoît va quitter le ministère qui lui a été confié en 2005 pour des raisons officielles d'âge. A 85 ans, le souverain pontife estime qu'il n'est plus en mesure d'assurer sa fonction. Alors qu'on croyait qu'un Pape ne démissionnait pas, la jeune génération vient d'apprendre le contraire. Si bien que les raisons d'âge avancées semblent peu convaincantes ; quand bien même il est écrit qu'un Pape peut pour des raisons diverses quitter ses fonctions.
En effet, quand on analyse un peu plus profondément les raisons qui guident le raisonnement de Benoît XVI, on est perplexe. Un Pape c'est à vie. Quel que soit son âge. SI bien qu'on est fondéà croire que les raisons véritables de la « démission » du Pape se trouvent ailleurs. Et cela est d'autant plus vrai qu'un Pape ne « démissionne » pas. Il « renonce »à son pontificat, soutiennent les spécialistes. En décidant donc de démissionner, on pourrait bien comprendre que Benoît XVI a été« contraint » par les événements, aussi scandaleux les uns que les autres, au sein même de l'Eglise. L'Eglise, on le sait, est en ce moment dans ce qu'on pourrait comparer à une mue forcée. Obligée qu'elle est d'adopter ou d'accepter « les choses » comme elles se présentent : le mariage homosexuel ; les accusations de pédophilie portées contre des prêtres ; etc.
En démissionnant pratiquement sous pression, le Pape en tant que chef d'Etat du Vatican donne par cet acte une leçon de démocratie mais également de raison à ces nombreux chefs d'Etat qui, souvent handicapés par l'âge ou la maladie continuent de s'accrocher au pouvoir. Jusqu'à la décision suprême : la mort si les populations savent patienter. Au cas contraire, c'est le désordre total. Les exemples sont légion et le plus flagrant en ce moment est celui d'Hugo Chavez au Venezuela. Foudroyé par un cancer, il est depuis des mois absent de son pays pour des soins à Cuba. Malgré son incapacité avérée à diriger son pays, il continue d'en être le chef d'Etat sur un lit d'hôpital. En Syrie, la contestation population depuis des mois n'a pas réussi à faire fléchir le président Assad. Même pas les milliers de morts de ses compatriotes enregistrés jusque-là.
Plus proche de nous, si la République démocratique du Congo, l'ex-Zaïre connaît jusqu'à nos jours l'instabilité politique et sociale, c'est parce que le président Mobutu n'avait jamais voulu quitter le pouvoir au moment où il le fallait. Idem en Guinée Conakry où Lansana Conté, malgré la maladie et la démence mentale, n'avait jamais accepté remettre le pouvoir. A sa mort, la Guinée est tombée dans le chaos. Jusqu'à présent, l'actuel président Alpha Condé, même élu démocratiquement n'arrive pas à assurer une véritable stabilité dans son pays. En Côte d'Ivoire, l'héritage politique, économique et social de Félix Houphouët-Boigny n'a pas pu bénéficier aux Ivoiriens parce que celui-ci n'a pas su quitter le pouvoir au moment où il le fallait.
Autrement, il aurait pu protéger et sauvegarder cet héritage sur terre avant de la quitter. Si au Togo, le fils de son père Faure Eyadema a du mal à rassembler les Togolais autour de ses projets de société, c'est parce que son père a voulu le pouvoir pour lui seul jusqu'au dernier jour. Aujourd'hui, c'est le fils qui se démène parce que le père n'a pas su passer la main. En quittant donc la tête de l'Eglise au moment où on s'y attendait le moins, le Pape permet à celle-ci de s'écrire de nouvelles pages, en tenant compte de son temps. Autrement dit, l'Eglise ne peut plus être indifférente au nouveau monde. Benoît XVI a-t-il voulu précipiter les choses ? A l'Eglise de savoir s'adapter si elle veut continuer d'être une référence.
Dabaoué Audrianne KANI
L'Express du Faso